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partaient pour le boulevard Gambetta. Venez. Notre voiture est là.

Il m’entraîna. Son amie Anne nous suivait, mais je vis, quand elle monta dans la voiture, qu’elle n’avait plus de boucles d’oreille et plus de bagues. On entendait dans sa robe de petits craquements qui étaient des chocs de turquoises.

Quand ils apprirent mon départ, Anne et Simon voulurent me faire connaître un soir leurs amis voyageurs. Je vis arriver, à de longs ou courts intervalles, et comme si c’était l’arrivée même d’une course autour de la terre, un jeune homme tout blond, potelé, craquelé par la Chine mais toujours rose, qui était le duc de Sarignon, une vieille actrice israélite des Français, qui parlait avec l’accent anglais et qu’on appelait Ceorelle, un explorateur d’âge, remarquable en tous pays par ses canines qui étaient doubles, le seul qui parût avoir tiré un profit naturel de ses voyages, car il avait des perles aux oreilles, une chaîne de corail, des boutons en dents de molosse et des photographies de Lapons dans ses poches ; la princesse Marie Belliard, toujours si curieuse et si étonnée de ce que disaient les autres qu’on se