Page:Giraudoux - Suzanne et le Pacifique, 1925.djvu/27

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pas de bémol ; pas de gourmand-avare, de vaniteux-modeste ; insensibles, nous frappions à tour de bras sur chacun, ou nous amusant, comme à notre piano le jour que nous avions pris le morceau où Fou croise les mains, à des visites alternées, de l’avare au prodigue, de l’envieux au satisfait… C’était le 14 juillet, les drapeaux à la fenêtre le matin qui font à la fois le bruit de la pluie et le bruit du feu, et les chevaux de bois qui tournent autour de l’arbre de la liberté… C’était la foire, et le sommeil troublé par des meuglements, des hennissements coupés court comme si le paysan étouffait de ses mains la bouche du cheval ou du bœuf, des piétinements, la relève mensuelle que font les animaux vers le travail et la mort. C’était la Sainte-Hortense, c’était le 15 août, gonflés de soleil et sonores comme des chapelles désaffectées. C’était la mort de madame Parpon, et son mari qui sifflait toujours, commençant chaque minute un sifflet machinal, s’arrêtant dès la première note, faisant toute la première semaine de son deuil le même bruit qu’un crapaud le soir : c’était une faillite, et l’avoué failli, qui hier écartait du pied mon chien couché sur le trottoir, se baissant pour le caresser et le contournant. C’était un incendie dévorant le hall de l’hôtel ; on voyait les boules de verre refléter un moment les