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y mettre de prétention, sans faire les difficiles, et en cela se marque leur esprit de pauvreté. Ils n’ont pas derrière eux, comme les Cisterciens, une forte doctrine esthétique, un credo et des lois qu’ils appliquent partout. On voit bien que ce ne sont pas des ordres d’invention française ! Les têtes de chez nous, les partisans de l’alignement, comme Humbert de Romans, le grand général dominicain, se plaignent de la fantaisie et de l’irrégularité dans les constructions. « Autant de maisons, autant de styles » ! Il souhaite un canon, une règle invariable. Autant vaut dire qu’il dénie à son ordre son véritable caractère. Car il se trouve justement que cette spontanéité, cet air de circonstance et même d’occasion sont peut être le plus grand charme des églises nouvelles et leur meilleure chance d’originalité. Nous allons voir comment le type cistercien modifié, altéré, simplifié, remanié un peu au petit bonheur par les moines mendiants, en arrive à une formule extrêmement éloignée de son point de départ, et à des résultats qui n’ont plus en réalité de gothique que le nom.

Essayons de nous représenter comment les choses se passent, et de voir un peu les frères à l’œuvre. Voilà une mission qui arrive dans une ville. Elle s’installe dans les faubourgs, dans quelque terrain vague d’un quartier excentrique, près des petites gens, au bout d’une rue populeuse. Parfois, les villes ont grandi, les couvents se trouvent englobés dans les constructions modernes : à Florence, à Venise, les maisons des Mendiants ont l’air aujourd’hui d’être au centre : c’est la périphérie qui a changé de place. Dans les villes qui ont conservé leur physionomie, à Sienne ou à Pérouse, — et il en fut ainsi un jour dans toute l’Europe, — vous êtes sûr de trouver, à un petit quart d’heure de marche en partant de la cathédrale, d’une part un S. Francesco,