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celui du musée Grévin. Mais il ne faut pas qu’un mot, un nom déshonoré par une badauderie vulgaire, nous fasse condamner sottement une méthode un peu hardie. Peut-être notre surprise est-elle faite de nos préjugés. Nos yeux sont habitués à une statuaire incolore ; mais la Grèce peignait ses marbres des tons les plus voyants. Prenons garde que notre délicatesse ne soit ici une véritable débilité du goût. Les anciens étaient moins timides. Sans doute, Michel-Ange eût tourné le dos de pitié à la friperie théâtrale de la Passion de Varallo, à son mélange de tous les genres et de tous les procédés plastiques. Mais l’essai même en est curieux, et c’est le dernier aboutissement de la logique franciscaine. L’art, pour les gens de cette école, a toujours été un moyen, non une fin. Avec un magnifique mépris des conventions, les Franciscains de Varallo ont fait un amalgame des règles, une intrépide « salade » d’arts, pour obtenir le maximum d’illusion possible. Si Varallo n’existait pas, il manquerait une étape suprême à leur recherche obstinée de la réalité.

Et puis, songeons qu’un grand artiste n’a pas dédaigné de mettre la main à cette œuvre singulière. Ce maître peu connu en France, n’est guère sorti des limites d’un petit territoire compris entre Milan et Turin. C’est un pays où le voyageur pressé ne s’arrête guère. Mais qui a pris le temps de visiter à loisir les églises de Côme, de Novare, de Verceil, sait qu’on ne citerait pas, en son temps, de maître plus varié et plus fort que Gaudenzio Ferrari ; et qui connaît le tourbillon d’anges dont ce peintre a peuplé la coupole de Saronno, n’ignore plus qu’il y a là un rival de Corrège.

C’est pourtant ce maître puissant qui n’a pas craint de déroger en collaborant à l’ouvrage dont le caractère composite nous étonne ; et un critique contemporain,