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Minz, — c’était le nom de la défunte. Elle l’avait, disait-il, accompagné tout le long de ses pieuses visites aux sanctuaires de Jérusalem, et l’avait quitté brusquement, au retour, alléguant qu’on avait besoin d’elle au couvent, et qu’il s’adressât là pour en apprendre davantage. On reconnut que c’était le jour où la sœur Maria était morte et avait terminé son mystérieux itinéraire[1].

Les Chemins de croix ne sont donc qu’une application plus précise de ces exercices sur la Passion qui sont une part si importante de la piété des Mendiants. Mais il y en avait d’autres, et vous y prendrez sur le fait ce procédé de morcellement, cette spécialisation du culte à un objet et à une partie de l’objet, que je vous signalais tout à l’heure : c’est ce qu’on voit, par exemple, dans les confréries des Cinq-Plaies ou du Précieux Sang.

« Dans les cavernes de ses blessures je me cacherai, j’y vivrai blotti ; on ne pourra me chercher ailleurs ni me chasser de là… Je m’y ferai trois tabernacles, l’un dans ses mains, l’autre dans ses pieds, le troisième et le plus cher dans la plaie de son côté : là je veux reposer, dormir ; là sera ma seule nourriture, là toute ma lecture et toute mon oraison. » Ainsi s’exprime l’auteur du Stimulus amoris[2], et en combien de manières la mystique franciscaine n’a-t-elle pas développé ce thème ? De la Passion, en effet, il était naturel d’extraire, si je puis dire, tous les principes de souffrance ; on les énumérait, on les considérait à part et comme à l’état pur, on leur donnait enfin une espèce de réalité ou d’existence indépendantes. Les Plaies, les instruments, les emblèmes

  1. Chronique cistercienne de Bernard de Brito (Lisbonne, 1602, p. 463), citée dans Thurston, loc. cit., p. 23 et suiv.
  2. Stimulus amoris, édit. Quaracchi, 1905, p. 71. Ce petit traité, faussement attribué à saint Bonaventure, est l’ouvrage de Jacques de Milan. Cf. Douais, De l’auteur du Stimulus amoris, 1885 ; — Sbaralea, Suppl. ad Scriptores trium Ordinum S. Francisci, p. 161 et 334.