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contours, la faible faculté plastique, le charme virginal de l’émotion morale. Voilà bien les Madones siennoises, avec leurs doux ovales, leurs longs yeux en amande, leurs tempes limpides, leurs joues pures, leurs petites bouches ensorcelantes et presque japonaises ; voilà leurs corsages minces et les longs doigts de lys qui terminent leurs mains exsangues. Nulle part on n’a rêvé une race de vierges d’une aristocratie plus diaphane et plus exquise.

(Plus tard, au xvie siècle, la colonie espagnole attirée à Florence par Éléonore de Tolède, obtint pour ses dévotions l’antique chapelle capitulaire, qui en retient aujourd’hui le nom de chapelle des Espagnols).

Cette chapelle est un quadrilatère orienté du Nord au Sud sur son petit axe et de l’Est à l’Ouest sur le grand axe. Le mur du Nord, en face de la porte d’entrée, est percé d’une niche où est logé l’autel. Comme toujours dans un ensemble décoratif bien entendu, c’est la voûte qu’il faut interroger d’abord. Elle ne fait que résumer sous une forme appropriée le sens des scènes diverses déployées sur les murs ; et celles-ci, à leur tour, ne sont que le développement des thèmes généraux proposés sur la voûte. Ces quatre thèmes sont les suivants : la Résurrection, l’Ascension, la Pentecôte et enfin la Navicella ou Jésus marchant sur les eaux [1]. Sous la Résurrection, à cheval sur la niche où se trouve l’autel, l’artiste a développé, avec la mise en scène siennoise, la montée au Calvaire, la Crucifixion et la descente aux Limbes ; sur le mur

  1. Cette idée de la Navicella est une des plus chères à Frà Passavanti. Elle domine son livre, il y revient à toutes les pages. L’Église, l’âme battue des vents et livrée aux orages, Pierre déjà englouti à demi par les flots, reçoivent toujours du Christ et secours et salut ; dans les temps présents, l’Ordre de saint Dominique est la forme de cette assistance providentielle. Cette fresque a encore l’intérêt de reproduire fidèlement la mosaïque de Giotto à Saint Pierre de Rome, telle qu’on la voyait avant les restaurations ; elle concorde avec le dessin de la collection Pembroke. Cf. Venturi, loc. cit., t. V, fig. 242 et 629. La liaison des idées entre les diverses fresques est bien présentée dans l’ouvrage cité de Wood-Brown.