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« Mon guide, mon seigneur et mon maître. » Sentiment, je le sais, un peu de l’autre monde, et qui ferait hausser les épaules à un instituteur primaire. Nos pères avaient là-dessus d’autres idées que les nôtres. Moins soucieux que nous de la chimère de l’indépendance, jamais ils n’avaient trop honoré, à leur gré, ce qui fait le lien et la société des hommes…

Je me propose maintenant d’étudier cette partie de l’art italien conçue d’après le type des Disputes de saint Thomas, et que l’on peut appeler des œuvres scolastiques. Ces œuvres semblent une spécialité dominicaine. Il ne s’agit pas de savoir si les franciscains n’ont pas eu des docteurs importants, Alexandre de Halès ou saint Bonaventure, Scot ou Occam, Raymond Lulle ou Roger Bacon[1] : presque sans exception, ces maîtres n’ont exercé aucune influence artistique. L’art franciscain enseigne peu : il raconte, édifie[2]. Tel sera justement l’intérêt de notre étude : nous y verrons, sous l’action des forces contemporaines, l’enseignement dominicain obéir à la loi générale de l’époque, renoncer progressivement à la haute philosophie, les éléments rationnels se dissoudre et céder la place à des leçons plus populaires. C’est la crise très curieuse que j’essaierai d’analyser. J’étudierai à cet effet trois groupes de monuments. Partis de Florence, nous remonterons un moment vers le Nord, pour redescendre enfin à Pise et retrouver après ce circuit notre conclusion tout près de notre point de départ.

  1. Cf. Hilarin de Lucerne, Histoire des Études dans l’Ordre franciscain, trad. fr. Paris, 1909.
  2. Voir pourtant le Triomphe de saint Bonaventure (?) dans une chapelle de S.-Francesco de Pistoie. Reproduction dans Giglioli, Pistoia nelle sue opere d’arte, Florence, 1904. Cf. Chiapelli, Pagine d’antica arte fiorentina, Florence, 1904.