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découvrir. C’est pourtant cet auteur qui a eu le mérite de développer le thème, de mêler les deux existences dans un récit continu, d’écrire ce duo où la vie de Jésus s’entrelace toujours à la vie de Marie. Par là, le Christ achève de se relier à la terre ; par l’être de son être, par cette chétive vie que l’homme tient de la femme, il rentre dans l’humanité.

De la première ligne à la dernière, Marie ou quelque femme est en scène. Chose curieuse ! Les apôtres, Pierre, Jacques, Jude, Jean lui-même, se tiennent à l’écart, le plus souvent dans la coulisse ; au contraire l’élément féminin, ce charme subtil de l’Évangile, paraît au premier plan. De longues parenthèses sont consacrées à Marthe, à la Samaritaine, surtout à Madeleine. Tout ce dont se passe si bien l’Évangile des docteurs, reprend la première place et ne la quittera plus. Ce sont les Mendiants qui ont réhabilité sainte Madeleine. Les Prêcheurs, près de la Sainte Baume, lui consacrent leur Saint-Maximin[1]. Les Mineurs ont fait d’elle une de leurs saintes de préférence. Depuis les fresques d’André de Bologne dans l’église inférieure d’Assise[2], jusqu’aux mille tableaux du XVIIe siècle qui représentent sa pénitence, sa figure chérie ne cesse de reparaître, comme un appel à cet amour qui se fait tout pardonner.


    dérive du Pseudo-Anselme. Mais celui-ci doit lui-même beaucoup à saint Bernard, le docteur de la Vierge, il suo fedele Bernardo. Du reste, ces idées sont communes, vers l’an 1300, dans la littérature franciscaine : voir entre autres le Corrotto de Jacopone da Todi.

  1. Rostan, Monographie du couvent des Dominicains de Saint-Maximin, Draguignan, 1873 ; Albanès, Le couvent de Saint-Maximin, Marseille, 1880.
  2. Document publié par Filippini, dans le Bollettino d’arte del ministero della Pubblica Istruzione (V. 2). Ces fresques, attribuées jusqu’à ce jour à Giotto, à Buffalmaco, à Pace di Faenza, se trouvent dans la chapelle du cardinal Albornoz. La chapelle fut commencée en 1362, la décoration en 1368. André de Bologne est l’auteur d’un manuscrit à miniatures conservé au musée Condé : la Canzone delle virtù e delle scienze, de Bartolommeo di Bartoli, dont il sera question dans la prochaine leçon.