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la moralité triviale et de peu d’utilité. Pilpay a cependant le mérite d’avoir inventé une fiction agréable, qui orne la vérité, et qui adoucit peut-être à l’oreille des rois la rudesse de l’instruction. Les Indiens voulant, par cette même méthode, avertir les monarques qu’ils n’ont de forces que celles de leurs sujets, avaient imaginé le jeu des échecs, qui s’introduisit encore dans la Perse sous le règne de Nushirwan[1].

Paix et guerre avec les Romains. A. D. 533-539.

Le fils de Kobad monta sur le trône au milieu d’une guerre avec l’empereur d’Orient, et les inquiétudes que lui donnait sa position domestique le déterminèrent à accorder une suspension d’armes que Justinien était impatient d’acheter. Chosroès vit les ambassadeurs romains à ses pieds ; il accepta onze mille livres d’or pour prix d’une paix perpétuelle ou indéfinie[2] : on régla des échanges réciproques ; le roi de Perse se chargea de garder les postes du Caucase, et la démolition de Dara fut suspendue, à condition que le général de l’Orient ne résiderait jamais dans cette place. L’ambition de l’empereur eut soin de profiter de cet intervalle de repos qu’elle avait demandé. Ses conquêtes en Afrique furent le premier fruit de son traité ; et l’avidité de Chosroès put être

  1. Voyez l’Historia Shahiludii du docteur Hyde. Syntag. Dissert., t. II, p. 61-69.
  2. La paix perpétuelle (Procope, Persic., l. I, c. 21) fut signée ou ratifiée la sixième année du règne de Justinien et sous son troisième consulat (A. D. 533), entre le premier janvier et le premier avril. (Pagi, tom. II, p. 550). Marcellin, dans sa Chronique, prend le langage des Mèdes et des Persans.