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trépidité de se tenir à deux portées de trait des Romains et au milieu des cadavres de leurs compatriotes jusqu’à la septième heure de la nuit. Vers la huitième heure, ils se retirèrent dans leur camp qu’on n’avait point pillé ; ils rassemblèrent leurs bagages, et se dispersèrent de tous côtés, faute d’ordre plutôt que de courage. Héraclius profita de la victoire avec une activité admirable : au moyen d’une marche de quarante-huit milles en vingt-quatre heures, son avant-garde occupa les ponts du grand et du petit Zab ; et les villes et les palais de l’Assyrie s’ouvrirent pour la première fois devant les Romains. Les regards frappés d’une magnificence toujours croissante, ils pénétrèrent jusqu’à la résidence royale de Dastagerd ; quoiqu’on eût enlevé une partie de ses trésors et qu’on y eût pris des sommes considérables pour fournir aux besoins publics, les richesses qu’on y trouva surpassèrent les espérances des vainqueurs et parurent même satisfaire leur cupidité. Ils brûlèrent tout ce qu’ils ne purent transporter aisément, afin que Chosroès connût par sa propre expérience quels étaient les maux dont il avait si souvent accablé les provinces de l’empire : la vengeance eût pu paraître excusable, si cette déprédation se fût bornée aux objets du luxe personnel du grand roi ; si la haine nationale, la licence des troupes et le fanatisme religieux n’eussent pas ravagé les habitations et les temples de ses innocens sujets. La reprise de trois cents drapeaux romains, et la délivrance d’un grand nombre de captifs d’Édesse et d’Alexandrie