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l’Empire romain. Chosroès fit reposer ses troupes dans ce paradis avant de monter les collines du Liban ou d’envahir les villes de la côte de Phénicie. [De la Palestine. A. D. 614.]La conquête de Jérusalem[1], qu’avait méditée Nushirwan, fut exécutée par le zèle et l’avidité de son petit-fils. L’esprit intolérant des mages demandait à grands cris la ruine de l’édifice le plus imposant du christianisme ; et Chosroès vint à bout d’enrôler pour cette sainte guerre une armée de vingt-six mille Juifs, qui suppléèrent en quelque sorte par la fureur de leur zèle au défaut de valeur et de discipline. Jérusalem fut prise d’assaut après la réduction de la Galilée et du pays qui est au-delà du Jourdain, dont la résistance semble avoir différé le sort de la capitale. Le saint Sépulcre et les belles églises d’Hélène et de Constantin furent consumés ou du moins endommagés par les flammes ; le conquérant pilla en un jour tout ce que la piété des fidèles y avait apporté durant trois siècles. On conduisit en Perse le patriarche Zacharie et la vraie Croix ; et on impute le massacre de quatre-vingt-dix mille chrétiens aux Juifs et aux Arabes, qui augmentèrent les désordres dont fut accompagnée la marche de l’armée persanne. La charité de Jean, archevêque d’Alexandrie, que son

  1. Voyez sur la conquête de Jérusalem, événement si intéressant pour l’Église, les Annales d’Eutychius (tom. II, p. 212-223) et les lamentations du moine Antiochus (apud Baron., Annal, ecclés., A. D. 614, nos 16, 26), dont cent vingt-neuf homélies subsistent encore, si toutefois on peut dire qu’elles existent, puisque personne ne les lit.