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saient la théorie de la guerre aussi-bien que ceux de César et de Trajan. Le fer de la Toscane ou du Pont recevait toujours des ouvriers de Byzance la trempe la plus fine et la meilleure. Les arsenaux étaient remplis d’armes offensives et défensives de toute espèce. Dans la construction et l’usage des navires, des fortifications et des machines de guerre, les Barbares admiraient la supériorité d’un peuple dont ils triomphaient si souvent sur les champs de bataille. Les livres des Grecs et des Romains enseignaient l’art de la tactique, les évolutions et les stratagèmes de l’antiquité ; mais des provinces désertes ou des peuples dégénérés ne pouvaient plus fournir des hommes en état de manier ces armes, de défendre ces murs, de faire manœuvrer ces vaisseaux, et dont le courage sût réduire avec succès en pratique la théorie de la guerre. Le génie de Bélisaire et de Narsès s’était formé sans maître, et ne laissa point de disciples. L’honneur, le patriotisme, ou une superstition généreuse, ne pouvait plus donner la vie à ces corps composés d’esclaves et d’étrangers admis aux honneurs de la légion. Ce n’est que dans le camp que l’empereur aurait dû exercer un pouvoir despotique, et c’est là qu’on lui désobéissait et qu’on l’insultait : il calmait et excitait avec de l’or la licence des troupes ; mais leurs vices tenaient à la constitution militaire ; leurs victoires étaient accidentelles, et leur solde dispendieuse épuisait un état qu’elles ne pouvaient défendre. Après une longue et pernicieuse indulgence, Maurice essaya de guérir ce mal invétéré ; mais sa témé-