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comme étrangers et comme aubains les cognats de toutes les classes, sans faire même une exception en faveur des liens si doux de mère et de fils. Chez les Romains, un nom commun et des rites domestiques unissaient une gens ou un lignage. Les cognomen, ou surnoms de Scipion ou de Marcellus, distinguaient les branches ou familles subordonnées de la race Cornelia ou Claudia : au défaut des agnats du même surnom, des parens auxquels on donnait la dénomination plus générale de gentiles les remplaçaient ; et la vigilance des lois conservait dans les individus du même nom la lignée perpétuelle des cérémonies religieuses et des propriétés. Un principe de même nature dicta la loi Voconia[1], qui ôta aux femmes le droit d’hériter. Tant que les vierges furent données ou vendues à leurs époux, l’adoption de la femme éteignait les espérances de la fille : mais les matrones indépendantes ayant recouvré ce droit, qui alimentait leur orgueil et leur luxe, elles purent transporter les richesses de leurs pères dans une maison étrangère. Les maximes de Caton[2], aussi long-temps

  1. La loi Voconia fut publiée l’an de Rome 584. Le plus jeune des Scipions, qui avait alors dix-sept ans (Freinshemius, Supplément de Tite-Live, XLVI, 40), trouva l’occasion d’exercer sa générosité envers sa mère, ses sœurs, etc. Polybe, qui vivait dans sa maison, fut le témoin de cette belle action (t. 11, l. XXXI, p. 1453-1464, édit. de Gronovius).
  2. Legem Voconiam (Ernesti, Clavis Ciceroniana) magnâ voce bonis lateribus (à soixante-cinq ans) suasissem, dit Caton l’Ancien (De Senectute, c. 5). Aulu-Gelle (VII, 13 ; XVII, 6) en a conservé quelques passages.