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vait épouser la fille de son père, un Athénien, la fille de sa mère, et Athènes applaudissait au mariage d’un oncle avec sa nièce, comme à une union fortunée entre des parens qui se chérissaient. L’intérêt ou la superstition n’excita jamais les législateurs de Rome profane à multiplier les degrés défendus ; mais ils prononcèrent un arrêt inflexible contre les mariages des sœurs et des frères ; ils songèrent même à frapper du même interdit les cousins au premier degré ; ils respectèrent le caractère paternel des tantes et des oncles, et traitèrent l’affinité et l’adoption comme une juste analogie des liens du sang. Selon les orgueilleux principes de la république, les citoyens pouvaient seuls contracter un mariage légitime : un sénateur devait épouser une femme d’une extraction honorable, ou du moins libre ; mais le sang des rois ne pouvait jamais se mêler en légitime mariage avec le sang d’un Romain ; la qualité d’étrangères abaissa Cléopâtre et Bérénice[1] au rang de concubines[2] de Marc-Antoine et de Titus. Toutefois cette dénomination de concubines, si

  1. Lorsque Agrippa, son père, mourut (A. D. 44), Bérénice avait seize ans (Josèphe, t. I, Antiquit. judaïq., l. XIX, c. 9, p. 952, édit. Havercamp). Elle avait donc plus de cinquante ans lorsque Titus (A. D. 79) invitus invitam dimisit. Cette date n’aurait pas produit un heureux effet dans la tragédie ou la pastorale du tendre Racine.
  2. L’Ægiptia conjux de Virgile (Énéid., VIII, 688) semble être comptée parmi les monstres qui firent la guerre avec Marc-Antoine contre Auguste, le sénat et les dieux de l’Italie.