Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 8.djvu/21

Cette page a été validée par deux contributeurs.

issue, dont l’une du côté de la terre, et l’autre du côté de l’eau ; ces issues servaient également de sortie à un animal moins propre, moins actif et moins social que ce merveilleux quadrupède. La fertilité du sol, plutôt que le travail des naturels, fournissait à la rustique opulence des Esclavons. Ils possédaient beaucoup de moutons et de bêtes à cornes d’une forte taille ; et leurs champs, où ils semaient du millet et du panis[1], leur donnaient une nourriture plus grossière et moins nourrissante que le pain : ils enfouissaient ce trésor pour le soustraire au pillage continuel de leurs voisins ; mais dès qu’un étranger arrivait parmi eux, ils lui en donnaient volontiers une partie ; et ce peuple, dont le caractère se présente d’ailleurs sous des couleurs peu favorables, était recommandable par sa chasteté, sa patience et son hospitalité. Ils adoraient comme leur divinité suprême un dieu maître invisible du tonnerre. Les rivières et les nymphes des eaux obtenaient un culte subordonné ; et leur culte public se composait de vœux et de sacrifices. Ils ne voulaient reconnaître ni despote, ni prince, ni magistrat ; mais leur peu d’expérience et la violence de leurs passions ne leur

  1. Panicum millium. (Voy. Columelle, l. II, c. 9, p. 430, édit. de Gesner ; Pline, Hist. nat., XVIII, 24, 25.) Les Sarmates faisaient une espèce de bouillie avec du millet, mêlé à du lait ou à du sang de jument. Au milieu des richesses de la culture moderne, le millet sert à nourrir la volaille et non pas les héros. Voyez les Dictionnaires de Bomare et de Miller.