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cinq pieds d’élévation. L’ordre corinthien observé dans les proportions et les ornemens, annonce l’architecture des Grecs ; mais Baalbek n’ayant jamais été la résidence d’un monarque, on a peine à concevoir que la libéralité des citoyens ou celle du corps de ville aient pu fournir à la dépense de ces magnifiques constructions[1]. Après la conquête de Damas, les Sarrasins marchèrent vers Héliopolis et Émèse ; mais je ne reviendrai pas sur des détails de sorties et de combats dont j’ai déjà présenté le tableau sur un plus grand théâtre. Dans la suite de cette guerre, ils n’obtinrent pas moins de succès par leur politique que par leurs armes ; ils divisèrent leurs ennemis par des trêves particulières et de peu de durée ; ils habituèrent le peuple de Syrie à comparer les avantages de leur alliance et les dangers de leur inimitié ; ils le familiarisèrent avec leur langue, leur religion et leurs mœurs, et épuisèrent par de secrets achats les magasins et les arsenaux des villes qu’ils voulaient assiéger. Ils exigèrent une rançon plus forte des plus riches et des plus obstinées ; Chalcis seule fut

  1. Les Orientaux expliquent ce fait miraculeux au moyen d’un expédient qui ne leur manque jamais ; ils disent que les édifices de Baalbek furent construits par des fées ou des génies (Hist. de Timur Bec, t. III, l. V, c. 23, p. 311, 312 ; Voyage d’Otter, t. I, p. 83). Abulféda et Ibn-Chaukel suivent une opinion qui n’est pas moins absurde, et qui suppose la même ignorance : ils les attribuent aux sabéens ou aadites. Non sunt in omni Syriâ ædijicia magnificentiora his (Tabula Syriæ, p. 103).