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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

veulent les hérésiarques, aucun rapport de nature avec nous, soit qu’il ait fécondé le néant, soit qu’il ait travaillé sur la matière préexistante ; puisque, dans le premier cas, le néant est l’absence de l’être, et que, dans le second, la matière, en tout et partout, se trouve différente de Dieu ; car sans doute l’on n’osera pas faire de l’homme une partie de Dieu et un être qui lui soit consubstantiel. L’homme semblable et consubstantiel à Dieu ! Je ne sais en vérité comment, avec la connaissance de Dieu, on pourrait entendre de sang-froid une pareille assertion, surtout après avoir jeté un coup d’œil sur notre vie et les maux dont elle est mêlée. Ainsi donc, ô blasphème ! Dieu pourrait pécher dans quelques parties de lui-même, puisque les parties décomposent et recomposent le tout ? Si, au contraire, elles ne peuvent le recomposer, elles n’en étaient pas les parties. Mais rien de tout cela n’est vrai ; Dieu étant naturellement riche en miséricorde, c’est par l’effet de sa bonté qu’il veille sur nous, qui ne sommes ni ses éléments constitutifs, ni ses fils du côté de la nature. Et c’est bien là, certes, la plus grande preuve de la bonté de Dieu, que, malgré notre infériorité vis-à-vis de lui et en dépit d’une nature qui lui est absolument étrangère, il ait cependant pris soin de nous. La tendresse des animaux pour leurs petits, ainsi que l’amitié qui naît d’un commerce journalier entre deux esprits de même sentiment, sont fondées sur des relations naturelles ; mais la miséricorde de Dieu est abondante envers nous, sans que nous ayons avec lui aucune affinité, soit d’essence, soit de nature, soit de vertu particulière à notre être, sinon que nous sommes l’œuvre de sa volonté. Aussi, celui qui, volontairement et avec le secours de l’étude et de l’enseignement, est parvenu à la connaissance de la vérité, Dieu le convie au privilège de l’adoption, qui est le plus grand de tous les progrès. Ses iniquités enveloppent l’impie ; il est enchaîné dans les liens de son péché, et il ne peut les imputer à Dieu ! « Et en vérité, heureux l’homme qui craint toujours par esprit de piété ! »