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existant isolément, à la manière de l’espèce humaine, ayant une forme et une figure qui lui est propre ; enfin tout ce qui est particulier à la nature des corps. Mais dans ce cas, il ne faut donc plus dire que le Plerum n’est habité que par des esprits, et que les Æons sont de purs esprits. Il faut alors, au contraire, nous figurer les Æons, ayant des corps, buvant et mangeant chez le Père ; et le Père lui-même comme étant de cette nature toute matérielle.

Diront-ils que les Æons sont nés de leur Père, comme la lumière naît de la lumière, comme l’étincelle produit l’étincelle ; qu’ainsi les Æons sont nés du Logos, comme le Logos est né de Nus, comme Nus est né de Bythus ? Mais, dans cette hypothèse, il faut nécessairement qu’ils soient tous égaux par l’origine, par la forme, et par l’espèce : ils seront tous impassibles, si leur générateur est d’une essence impassible ; ou s’ils sont sujets au changement et aux passions, c’est que leur générateur y est également assujetti. Car le flambeau qui a été allumé par un autre flambeau n’a pas une flamme différente : aussi toutes les flammes se rapportent toujours à une seule et même flamme. On ne peut pas dire du feu qu’il est jeune ou vieux ; ce n’est qu’une même chose, qu’un même principe : les flambeaux successivement allumés ont tous la même flamme ; il n’y a de différence entre eux que pour le temps où ils ont reçu la communication de cette flamme.

De ce que les Æons doivent être tous semblables entre eux, il en résultera que si l’un est entaché d’ignorance et de péché, tous les autres, et toutes les divinités du Plerum, devront l’être également ; le Propator lui-même n’en sera pas exempt, et, de plus, il devra s’ignorer lui-même. Ou bien, si les Æons sont d’une nature impassible, tous les êtres du Plerum devront l’être aussi. Mais alors comment concevoir la possibilité que le plus jeune des Æons ait éprouvé cette souffrance et cette passion dont on nous parle ? Comment encore concevoir que, parmi les Æons, il y en aurait de jeunes et de vieux, puisqu’ils sont la lumière du Plerum, et qu’il est de l’essence de la lumière que toutes ses parties soient égales entre elles ? Veut-on les comparer