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ont nécessairement une fin ; il n’ignorait pas non plus combien il est difficile de détruire les préjugés du vulgaire une fois qu’il a adopté sans réflexion des fables absurdes. Voilà pourquoi il a dit qu’il était au-dessus de ses forces d’acquérir quelque chose de positif et de raisonner sur la génération des autres dieux ou démons, puisqu’il ne pouvait ni dire ni penser que les dieux fussent engendrés.

Ces autres paroles de Platon : « Le grand roi du Ciel, Jupiter, poussant un char agile, s’avance le premier, disposant et gouvernant toutes choses, tandis qu’une armée de dieux et de démons vient après lui, » ne doivent pas s’entendre de Jupiter, fils de Saturne. Jupiter désigne le créateur de toutes choses : c’est ce que Platon lui-même nous apprend ; n’ayant pas d’autre nom pour qualifier l’Être souverain, il se servit du nom de Jupiter, qui n’est pas le nom propre de Dieu, mais le plus populaire et le plus intelligible ; car il n’est pas toujours facile de se faire comprendre quand on parle de Dieu. Cependant il employa l’épithète de Grand pour distinguer le vrai Jupiter du Jupiter terrestre, celui qui est incréé de celui qui est engendré et qui est postérieur à la terre et au ciel, postérieur aux Crétois eux-mêmes, qui l’arrachèrent à la cruauté de son père.

XXIV. Mais qu’est-il besoin, puisque vous savez tout ce qu’il est possible de savoir, de vous citer les sentiments des poëtes et les autres opinions ? Ne puis-je pas dire en deux mots : Si les philosophes et les poëtes ne reconnaissaient point un seul Dieu, ils n’aviliraient pas les autres dieux jusqu’à dire qu’ils sont ou des démons, ou la matière, ou des hommes, et vous auriez un motif de nous persécuter : nous mettons une grande différence entre Dieu et la matière, entre la nature de l’un et la nature de l’autre ; car nous disons que Dieu, son Fils et le Saint-Esprit, ne sont, à raison de la vertu qui les unit, qu’un seul Dieu père, Fils et Saint-Esprit, parce que le Fils est la pensée, le verbe et la sagesse du Père, et que le Saint-Esprit n’est qu’un écoulement de l’un et de l’autre, comme la lumière vient du feu ; de même nous savons qu’il existe d’au-