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l’ordre qui fut donné de le conduire à Rome pour y être dévoré par les bêtes, le courage que montra le généreux martyr. Il ne nous reste donc plus qu’à le faire connaître par les ouvrages qu’il nous a laissés. Ce sont des lettres, au nombre de sept. Quand il fut conduit d’Antioche à Rome pour le martyre, il reçut des Églises les plus grandes marques d’affection ; leurs pasteurs se portaient avec empressement sur son passage pour lui offrir des secours au nom des fidèles, et en même temps pour lui faire honneur et le féliciter comme s’il eût été conduit au triomphe. C’est lui-même qui nous l’apprend dans ses admirables épîtres, où il témoigne sa reconnaissance aux fidèles de ces contrées. Ces épîtres nous ont été conservées comme un des plus précieux monuments de la sainte antiquité.

Partout il y manifeste une horreur extrême des doctrines particulières et des divisions ; il recommande par-dessus tout le respect pour les écrits et les traditions apostoliques ; il parle de la vénération due au caractère d’évêque en des termes si énergiques et si précis, qu’il confond d’avance les acéphales de tous les temps, c’est-à-dire les sectaires sans épiscopat et sans vrai sacerdoce.

C’est avec raison qu’on a dit de ces épîtres qu’elles étaient moins l’ouvrage d’un homme que celui de l’esprit de Jésus-Christ, qui animait les martyrs et embrâsait les âmes d’un feu tout divin. Quelle vigueur de pensée ! quelle énergie d’expression ! et en même temps quelle touchante effusion de cœur, quelle abondance de sentiments, quelle charité pour tous ses frères, quelle sollicitude pour son troupeau ! Jamais trône, jamais trésor, furent-ils l’objet de désirs plus ardents que ceux dont brûle saint Ignace pour trouver la mort, pour jouir des tortures, pour s’emparer de son Dieu ? N’est-ce point là dans toute sa force cette première sève du Christianisme dont parle Bossuet ?

Les écrivains du premier ordre dans tous les partis ne trouvent rien au-dessus des sept épîtres écrites par le saint martyr dans le cours de son voyage, aux Églises d’Éphèse, de Magnésie, de Tralles, de Rome, de Philadelphie, de Smyrne, et à saint Polycarpe. C’est à ce dernier que nous devons la con-