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Scène VI.

LÉONTINE, seule. (Elle s’assied à côté de la table sur laquelle est posée la corbeille.)

Son humeur austère & farouche me déplaît aujourd’hui plus que jamais. Il a une certaine sécheresse qui m’éloigne de lui. Avec de l’esprit, des vertus, des agrémens même, il n’est cependant point aimable. Ah ! c’est que son ame n’est point sensible ; il conçoit si peu qu’on puisse aimer avec passion. Ses conseils ont une sévérité qui révolte, & ne persuade point. Mais ils a peut-être raison. Je ne dois pas porter ce bouquet. (Elle prend le bouquet, & considère la corbeille.) Je ne dois pas enhardir, par cette condescendance, un amour insensé. Quel amour ! Que je plains le malheureux qui l’éprouve ! Voilà comme j’aimois. Toute cette aventure m’attriste, m’étonne, me trouble. Il me verra ce soir ! Il est dans ce Château. N’entends-je pas marcher près de moi ? (Elle se lève & se retourne avec un mouvement de frayeur.) C’est Dorothée. Tout m’agite & m’effraye aujourd’hui.