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LA FEMME

lui laissoit toute son estime pour Germeuil. Il étoit clair que le cœur de Germeuil flottoit entr’elle et madame de Nangis, et qu’en même temps, Germeuil étoit décidé à ne point trahir celle qu’il avoit séduite. Natalie trouvoit l’inconstance de Germeuil excusable et touchante, parce qu’elle en étoit l’objet ; mais si elle eût arrêté sa pensée sur madame de Nangis, elle eût frémi de l’imprudence des femmes qui sacrifient tout à l’amour. Elle écrivit à Germeuil un billet très-simple et très-court, qui ne contenoit que l’expression d’une tendre amitié. Elle se promit de justifier l’admiration qu’il lui montroit, ou, pour mieux dire, elle espéra l’accroître encore. Elle forma le projet de l’éviter avec soin, elle eut peu de mérite à tenir cette résolution ; elle étoit certaine que Germeuil soupçonneroit ses sentimens, et elle ne doutoit pas qu’une telle conduite n’exaltât encore l’opinion qu’il avoit déjà de son caractère.

Natalie fuyoit courageusement Germeuil depuis trois mois, lorsqu’un soir elle le vit arriver dans une maison où elle