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LA FEMME

rotée seule étoit dans sa confidence. Tout-à-coup, Natalie se renfermant chez elle, cessa presqu’entièrement de faire des visites et de paroître dans le monde ; ses parens et ses amis s’en plaignirent ; Dorothée eut à ce sujet une explication avec elle. Comme elle lui demandoit pourquoi elle s’étoit si subitement dégoûtée du monde : ce n’est point dégoût, répondit Natalie, je m’amuse toujours dans la société quand je m’y trouve, mais je me plais mieux encore dans mon cabinet ; écrire est pour moi une occupation délicieuse. — Prenez garde, Natalie, de vous livrer inprudemment à cette passion… — Eh pourquoi ? en est-il de plus douce, de plus innocente, et de plus facile à satisfaire ? Je n’ai que vingt ans, mais j’ai déjà assez réfléchi pour connoître et pour sentir avec effroi combien tout ce qui nous attache est fragile. Nous occupons si peu d’espace, nous parcourons une carrière si bornée, et la mort peut nous arrêter au commencement de notre course !… Ah ! je veux laisser à l’amitié des souvenirs durables, je veux