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Mlle DE CLERMONT.

son sang !… À ces mots l’infortunée s’évanouit.

Dans le trouble qu’avoit causé un si tragique événement, on avoit oublié de prendre une autre voiture ; on la remplit de feuillages afin de cacher le sang, et l’on s’enfonça dans la forêt. Une eau spiritueuse que la marquise fit respirer à mademoiselle de Clermont, fit r’ouvrir les yeux à cette malheureuse princesse, et lui rendit le sentiment de sa douleur. Où sommes-nous ? dit-elle, c’est au château que je veux aller… Hélas ! répondit madame de P***, nous y retrouverions le roi, et mademoiselle seroit obligée de paroître dans le salon… Obligée ! reprit-elle avec une profonde amertume… Oui, poursuivit-elle en versant un torrent de pleurs, oui, je ne suis qu’une vile esclave, jouet éternel d’une odieuse représentation… Je dois cacher les sentimens les plus naturels, les plus légitimes… je dois assister à des fêtes, je dois sourire quand je me meurs… Ce rang envié n’est qu’un rôle fatigant ou barbare qui nous impose jusqu’au tombeau les plus douloureux