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LA FEMME

Elle acheva plusieurs ouvrages, et entr’autres un roman. Quand on écrit avec vérité, qu’on ne cherche que dans son cœur les sentimens touchans qu’on veut exprimer, il y a dans cette occupation un tel charme, qu’elle peut facilement tenir lieu de bonheur. Il est beaucoup plus doux, pour le cœur et pour l’esprit, de faire un roman, que d’écrire sa propre histoire : dans le dernier cas, la dissimulation est, à-la-fois, un tort réel et une contrainte qui refroidit l’imagination, et la sincérité parfaite est toujours une imprudence, et communément un ridicule. Enfin, il est très-difficile de parler de soi avec grace, intérêt et dignité ; il est affreux de penser que les choses les plus dignes d’éloges seront toujours un peu suspectes, car la partialité naturelle de l’historien jette de grands doutes sur l’histoire. Mais en composant un roman, on peut, sans avoir le vain projet de faire son portrait, se peindre vaguement de mille manières, et s’embellir sans tromper le lecteur auquel on n’a promis qu’une fable. Il est plus doux encore de