Page:Gazier - Histoire générale du mouvement janséniste, depuis ses origines jusqu’à nos jours, tome 1.djvu/72

Cette page a été validée par deux contributeurs.
60
histoire du mouvement janséniste

que les historiens ; elle a consacré à cette « particulière amie et bienfaitrice », un article naïf qui se termine par ces mots : « L’affection qu’elle a toujours conservée pour ce monastère et qu’elle nous a témoignée dans les temps même les plus fâcheux, sans jamais avoir craint de se commettre, nous est un engagement particulier de nous acquitter des prières qu’elle doit attendre de notre reconnaissance. » La conversion de cette jeune et belle veuve de trente ans a été en 1639 l’œuvre simultanée de la Mère Angélique, de Robert Arnauld d’Andilly et de l’abbé de Saint-Cyran. Ce dernier lui a écrit de Vincennes, quatorze longues épitres ; Angélique a correspondu affectueusement avec elle, et d’Andilly n’a pas ménagé les visites à la belle pénitente. On voit par les lettres de la Mère Angélique que la princesse marchait à grands pas dans les sentiers de la perfection. C’était, dit-elle, « une vocation si rare que depuis un siècle il ne s’en est peut-être pas trouvé une semblable. » Mais l’année qui suivit la mort de Saint-Cyran, c’est-à-dire en 1644, Mme  de Guéméné se relâcha, parce qu’elle était tiraillée entre deux directions différentes, sinon contraires, celle de Singlin et celle de Robert d’Andilly, qui n’était pas alors un ascète, car il était fort enfoncé dans la cour. La cause de cette défaillance, que Saint-Cyran eût certainement empêchée, ce fut l’éducation du petit chevalier de Rohan, de ce misérable qui devait expier sur l’échafaud, en 1674, le crime de haute trahison. La princesse, soutenue par d’Andilly, voulait que son fils fût élevé très chrétiennement sans doute, et par les savants maîtres de Port-Royal, mais en prince qui saurait parfaitement danser, faire de l’escrime et monter à cheval. Il était né en 1635, et il ne fut jamais élève des Petites Écoles ; il reçut simplement quelques leçons