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histoire du mouvement janséniste

adressèrent des requêtes au nouvel archevêque pour le prier de continuer les informations juridiques commencées par le cardinal de Noailles, qui avait fait constater quatre miracles. Vintimille n’en fit rien, et le 27 janvier 1732 parut une ordonnance du roi disant que l’on cherchait à surprendre la crédulité du peuple. En conséquence le petit cimetière de Saint-Médard fut fermé, et un plaisant composa le distique célèbre :

De par le roi, défense à Dieu
De faire miracle en ce lieu.

Les miracles émigrèrent en province ; les convulsions et les secours dits meurtriers se propagèrent chez les particuliers, « dans les greniers, dit Voltaire, et chez des énergumènes de la lie du peuple », — c’est-à-dire en réalité dans les presbytères, dans les hôtels de parlementaires et de membres de la noblesse, tels que le comte de Labédoyère, le marquis d’Arbois, le comte de Tilly, le chevalier de Folard, etc. Finalement, le théâtre de ces convulsions, ce fut en plein Palais, l’appartement du propre frère de Voltaire[1].

Le plus célèbre de ces convulsionnistes, dont quelques-uns étaient en même temps des convulsionnaires, c’est le conseiller Carré de Montgeron, dont il faut étudier brièvement la vie et les œuvres, car rien ne donne une idée plus exacte de ce que fut Saint-Médard en 1731 et durant les années qui suivirent. Louis-Baptiste Carré de Montgeron est né à Paris en 1686, et il était le fils unique d’un magistrat devenu veuf de très bonne heure. Il fut mal élevé par un père qui avait des sentiments très nobles ; et il devint, c’est lui-même

  1. V. dans la Revue des Deux Mondes, 1er avril 1906, l’article intitulé : « Le frère de Voltaire ».