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chapitre xiv

L’évêque de Montpellier, Colbert, un des quatre appelants de 1717, répondit à l’ordre du roi comme les religieuses de Port-Royal l’avaient fait en 1705, lors de la Bulle Vineam Domini ; il introduisit à la suite de la signature la clause sans déroger…, qui avait amené la destruction du saint monastère, et il invoqua le bénéfice de la paix de Clément IX. Un arrêt du Conseil cassa le décret de la Faculté de théologie de Montpellier, mais Colbert protesta et adressa au roi des remontrances ; on lui répondit, le 21 septembre 1724, en saisissant son temporel et en déclarant ses bénéfices vacants et impétrables. La Cour cherchait à réduire ainsi par la famine un prélat qui aimait le faste ; mais Colbert ne faiblit pas : il restreignit ses dépenses, et il ne diminua rien de ses aumônes. Il fut approuvé par une infinité de personnes, et notamment par le célèbre Duguet, qui écrivit à cette occasion une fort belle lettre sur le Formulaire, et qui dut se cacher pour n’être pas emprisonné.

Beaucoup d’ecclésiastiques prirent également sa défense, et parmi eux se trouvait son coappelant Soanen, évêque de Senez, sur lequel se déchargea toute la colère de la Cour. L’assemblée du clergé avait en 1725 demandé au roi la permission de tenir des conciles provinciaux contre les évêques de Bayeux et de Montpellier ; mais ces deux prélats étaient, comme Noailles, de très noble race, un Colbert, un prince de la maison de Lorraine. Le roi, c’est-à-dire le cardinal Fleury, refusa l’autorisation demandée, et c’est alors que les défenseurs de la Bulle se rabattirent sur l’évêque de Senez, un roturier sans défense qui allait avoir quatre-vingts ans. Soanen publia le 28 août 1726, jour de la fête de saint Augustin, une Instruction pastorale qu’il considérait comme son testament spirituel et qui est