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histoire du mouvement janséniste

Nicole. Or l’évêque d’Angers fit une ordonnance opportune ou non, la question n’est pas là, pour se justifier des calomnies que lui imputait l’arrêt de Ninove ; il usait simplement, et avec beaucoup de modération, de son droit de légitime défense. La preuve qu’il n’avait pas si tort, c’est que cet arrêt ne comporta aucune suite, ni à Paris ni à Rome.

Une autre affaire bien autrement grave, ce fut la condamnation par le pape Innocent XI de soixante-cinq propositions de morale relâchée imputables aux Jésuites, et c’est là qu’il faut chercher la véritable cause de la rupture de 1679. Les jansénistes n’avaient jamais pensé que la paix de Clément IX pût entraîner par voie de conséquence une approbation de la morale relâchée des Casuistes. Les corrupteurs de la morale évangélique ne pouvaient en aucune façon bénéficier des concessions mutuelles que s’étaient faites les augustiniens et les molinistes, ils étaient toujours au ban de l’Église, et c’était toujours un devoir de les attaquer, de les traquer et de les dénoncer. Aussi vit-on paraître à Cologne, en 1669, chez Gervinius Quentel, un des imprimeurs elzéviriens des Messieurs de Port-Royal, le premier volume d’une collection qui s’est continuée jusqu’en 1694 et dont les six derniers volumes ont été faits avec la collaboration d’Arnauld lui-même. Il a pour titre : La morale pratique des Jésuites représentée en plusieurs histoires arrivées dans toutes les parties du monde… etc. Cet ouvrage n’a pas eu l’heur de plaire à Sainte-Beuve, qui s’emporte contre ses auteurs, Perrault, Varet, Pontchâteau, Arnauld et Nicole, avec une singulière véhémence. Il y voit une suite d’avanies faites à des vaincus (III, 216), et il va jusqu’à dire « Ces livres me dégoûtent et m’ennuient à n’en pouvoir parler. Que vous dirai-je ? Il y eut la