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chapitre ix

vous vous mêlez de juger de choses à quoi vous n’entendez rien vous n’êtes qu’une petite pimbêche, une petite sotte, une petite ignorante, qui ne savez ce que vous voulez dire ; il ne faut que voir votre mine pour le reconnaître. On voit tout cela sur votre visage[1]. » Les jours suivants, il alla de couvent en couvent pour retenir des places ; le 25 ce fut la reine mère, en personne qui pressa une visitandine de la rue Saint-Jacques, la Mère Eugénie de Fontaine, de venir prendre le lendemain le gouvernement de Port-Royal désorganisé par l’archevêque.

Le 26, en effet, jour de saint Bernard, la porte du monastère dut s’ouvrir pour laisser entrer sept ou huit carrosses, il y avait dans la cour du dehors vingt exempts avec leurs bâtons, et deux cents archers de différentes casaques armés de mousquets et de carabines c’était l’archevêque qui venait procéder à l’enlèvement de douze religieuses, parmi lesquelles se trouvaient l’abbesse, la Mère Madeleine de Sainte-Agnès de Ligny, et l’ancienne abbesse, la Mère Agnès Arnauld, âgée pour lors de soixante-treize ans. Elle avait peine à marcher, Péréfixe menaça de la faire prendre à quatre par les pieds et par la tête, et cela en présence de Robert Arnauld d’Andilly, son frère, un vieillard de soixante-seize ans[2].

  1. Hist. des persécutions, p. 293. On n’a malheureusement pas le portrait de la Mère de Ligny ; il n’a pas été possible de le donner dans l’Iconographie de P. R. publiée en 1909. On ne saurait dire si elle était effectivement de si petite mine ; la mine de l’archevêque n’était pas à ce moment celle d’un successeur des apôtres.
  2. Le lendemain de cet enlèvement, M. Bail, pour justifier sans doute l’épithète de fou que Péréfixe lui avait appliquée dans son entretien du mois de juin avec la Sœur Briquet, écrivait que les religieuses de P. R. avaient été traitées trop doucement par l’archevêque, et que si elles avaient été en Italie ou en Espagne, elles auraient été habillées en diables et brûlées toutes vives.