Page:Gautier - Les Deux Etoiles.djvu/41

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ment estompé par le brouillard, ne faisait pas trop mauvaise figure à l’horizon.

Soit que cet aspect lui fût familier, soit que la préoccupation éteignît en lui la curiosité, l’inconnu ne jetait les yeux sur les objets qu’encadrait successivement la vitre de la portière que pour se rendre compte du chemin parcouru.

La voiture traversa le pont de Soutwarck, faisant autant de bruit avec ses roues que le chariot sur le pont d’airain de Salmonée, et s’engagea de l’autre côté du fleuve en remontant du côté du Strand, dans ce dédale de petites rues qui longent la Tamise, et s’arrêta au bout d’un de ces passages, connus à Londres sous le nom de lane, dans les environs de l’église de Sainte-Margareth.

L’étranger tira sa montre et parut délivré d’un grand poids.

L’aiguille marquait onze heures.

Une distance de vingt lieues avait été franchie en trois heures.

Il jeta du côté de Sainte-Margareth un regard qui parut le satisfaire ; puis il s’enfonça résolument dans la petite ruelle que l’ombre de l’église et la hauteur des maisons rendaient encore plus obscure.

À peine eut-il fait quelques pas dans le lane, qu’un individu sembla se détacher de la muraille où il se tenait collé, et avec laquelle se confondait presque la couleur terne de ses vêtements, et s’avança vers l’inconnu.

— Vous venez de là-bas pour la chose en question ? murmura-t-il en passant près de lui.

— Oui, et je suis recommandé par Mackgill