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le second rang du collier

Mohsin fut désolé de cette décision et chercha à nous rencontrer, dans des maisons amies, ou au théâtre. Il était toujours, je ne sais comment, très bien renseigné ; il trouvait le moyen, aux premières représentations, de louer la loge voisine de la nôtre.

Mon père fut très irrité par ces manigances et faillit se fâcher tout à fait. Cependant, avant le départ pour la Perse, il accueillit aimablement la visite d’adieu, et laissa même le général me parler en particulier, quelques instants.

Au moment de s’éloigner, pour une année au moins, Mohsin me suppliait de lui promettre, sans pour cela m’engager avec lui, de ne pas me marier avant son retour. Il était certain de revenir, investi de hautes fonctions diplomatiques ; il pourra alors m’offrir des conditions de bonheur qui me décideraient peut-être.

Mais j’étais mal disposée ; l’idée de cette femme lointaine, dont l’avenir dépendait de moi et qui serait gardée, peut-être, si je ne promettais rien, me gênait et m’agaçait ; de plus, Théophile Gautier, si épris qu’il fût de l’Orient, le redoutait aussi et tâchait de me faire partager ses craintes : malgré le charme, l’intelligence et l’évidente bonté de Mohsin-Khan, il n’était pas très rassuré.

— Les Orientaux sont délicieux, disait-il, ils ont une douceur, une placidité incomparables ; mais ils ont aussi des colères farouches : la femme ne doit