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le second rang du collier

duisante : les faits qu’elle me révélait me paraissaient quelquefois invraisemblables, à tel point qu’arrivée au chapitre de la formation des cristaux, je ne pus croire à une loi aussi surprenante et refermai le livre, le soupçonnant d’être l’œuvre d’un mystificateur.

Nono, qui étudiait les langues orientales, voulut m’enseigner le persan : je n’apportai pas beaucoup d’ardeur à ce travail, mais dans les quelques vers, cités en exemple par la grammaire persane, je pris le goût de cette poésie et le désir d’en connaître davantage.

Je récitais sans cesse un distique que je n’ai jamais oublié :


Si ce jeune turc de Schiraz voulait accepter mon cœur,
Pour la noire éphélide de sa joue je donnerais Samarcande et Boukhara.


« Éphélide » nous taquinait, Nono et moi, mais « grain de beauté » était pire. Nous nous torturions l’esprit pour trouver l’expression juste et harmonieuse, mais il est vraisemblable qu’elle n’existe pas.

L’étude du piano à quatre mains nous absorba, ma sœur et moi, durant des après-midi entières. Nous ne désirions pas cependant devenir des pianistes, nous voulions parvenir à déchiffrer assez bien pour lire et comprendre la grande musique. M. Lafitte, chargé de famille et très occupé, ne