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Tokio

de la civilisation occidentale dans ce qu’elle a de plus laid.

À l’endroit où le train s’arrête, la ville nippone n’a, hélas ! aucun caractère individuel : on se croirait dans une ville banale des États-Unis. Mais, heureusement, cette impression décevante dure peu. Le temps de traverser un ou deux boulevards et l’on est dans de petites rues formées par une suite de petites maisons en bois, dont le toit se projette au-dessus des fenêtres, à vitres de papier, qu’il protège ; toutes ces maisons se ressemblent assez par la forme et la couleur un peu diluée par les intempéries.

D’autres rues sont larges et barrées de temps en temps par des portiques couverts d’un toit ; c’étaient autrefois des séparations qui indiquaient la limite des quartiers, et qu’on fermait régulièrement chaque soir. Mais cet usage est tombé en désuétude. Les rues sont toutes très animées par un peuple affairé. Il y a des voitures aussi, mais pas au point de former des encombrements comme sur les grands boulevards de Paris. À Tokio, la plupart des attelages sont traînés par des hommes, bien qu’il existe une misérable voiture à un seul cheval qui porte le nom peu glorieux de Kosika-bha-cha, c’est-à-dire, voiture de mendiant. Mais le mode de locomotion le plus gracieux et le plus confortable, est sans contredit le Norimono, jolie boite de laque doublée de délicates soies brodées, terminée à sa partie supérieure par de longs brancards qui dépassent des deux côtés et se posent sur les épaules