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pera sous mes yeux ne me tuera pas. Il ignore ce que c’est qu’un cœur de femme.

Tika, atterrée, ne disait rien. Assise aux pieds de sa maîtresse, elle laissait couler ses larmes.

On allait et venait devant l’habitation, des pas nombreux faisaient craquer le sable.

Fatkoura s’approcha de la fenêtre, elle regarda à travers le store.

On plantait des poteaux tout autour de la place nue qui s’étendait devant la façade du palais. Des hommes montés sur des échelles frappaient avec des maillets sur l’extrémité des poteaux, pour les faire entrer en terre. Puis, on apporta des caisses de laque noire aux encoignures d’argent et on en tira des draperies de soie blanche que l’on accrocha aux poteaux, de façon à enfermer la place ; les trois côtés dans une muraille d’étoffe. On étendit sur le sol plusieurs nattes et au centre une toute blanche, bordée d’une frange rouge ; sur cette natte, devait s’asseoir le condamné. On posa un pliant, sous la fenêtre de Fatkoura, pour le prince de Toza qui voulait assister au supplice.

La malheureuse jeune femme marchait fiévreusement dans sa chambre ; elle s’éloignait de la fenêtre, puis y revenait malgré elle. Ses dents s’entrechoquaient ; une sorte d’horrible impatience l’agitait : elle était épouvantée d’attendre.

Des soldats arrivèrent sur la place, puis des samouraïs, vassaux du prince de Toza.

Ceux-ci se réunirent par groupes et, la main appuyée sur leurs sabres, causèrent à demi-voix ; ils blâmaient tout bas la conduite de leur seigneur.

— Refuser le Hara-Kiri à un des plus nobles parmi