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qu’il vit de cet humble commerce au milieu d’une petite île de la mer polaire, entre son vieil aigle à demi déplumé et la chèvre Amalthée aux pis éternellement roses, répondant en dactyles et en spondées homériques aux demandes de ses rares clients ; nous ne saurions pas non plus qu’Ampelos, jetant la nuit le froc de moine qui le couvre le jour, célèbre, avec toute la pompe antique, les mystères des bacchanales, au fond des forêts de la Thuringe, en compagnie du père cellerier, transformé en Silène, et des jeunes novices reprenant le pied de bouc de l’ægipan, ou la peau de tigre de la mimallone. C’est par lui encore que nous avons appris le sort d’Hermès-Psychopompos, actuellement entrepreneur du transport des âmes sous l’habit de ratine d’un négociant hollandais, ainsi que celui de la sage Pallas-Athéné, réduite à ravauder des bas, et de la dévergondée Aphrodite, arrivée, comme une lorette vieillie, à faire des ménages et à poser des sangsues. — Mais le poète allemand, si bien informé, d’ailleurs, n’a rien dit du dieu Sylvain ; nous sommes en état de combler cette lacune. Sylvain, que l’on croit mort depuis deux mille ans, existe, et nous l’avons retrouvé : il s’appelle Denecourt. Les hommes s’imaginent qu’il a été soldat de Napoléon, et ils ont pour