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THÉOPHILE DE VIAU.

pensons pas ; du moins, les passages cités comme impies et blasphématoires ont besoin d’être singulièrement forcés et détournés de leur sens naturel pour prêter à des accusations semblables ; ce sont, la plupart du temps, des impiétés galantes, des Iris comparées à des anges, les tourments de l’amour jugés plus cruels que ceux de l’Enfer, des plaisirs préférés aux joies du Paradis, des imprécations contre le destin et autres gentillesses de ce genre. On en pourrait relever autant dans tous les poètes de l’époque. Le goût y est plus offensé, ce me semble, que la théologie. – Quant aux pièces tirées du Parnasse des poètes satyriques, qu’on lui attribuait, nous y viendrons tout à l’heure.

Mais Théophile avait été huguenot, et comme tel, malgré sa conversion, malgré la régularité peut-être affectée avec laquelle il se conformait aux commandements de l’Église, il était suspect d’hérésie. Le libre examen, qui est le fond du protestantisme, pousse à la philosophie et au libertinage. Cela, joint au motif particulier que Garasse avoue lui-même, et auquel nous avons fait allusion, suffisait, et au delà, à la perte du poète.

Grâce aux efforts de cette cabale, Théophile fut d’abord banni et, après un retour de faveur, condamné par le parlement à être brûlé, sentence qui ne s’exécuta qu’en effigie, car le poète avait pris la fuite. Repris, il fut incarcéré à la tour de Montgom-