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pas dire devant les juges le nom de sa fille coupable — et enfin, devenue reine, appelée à juger tous les forfaits qu’elle a commis et dont l’auteur est resté inconnu, se voit forcée de se condamner elle-même à mort quatre fois de suite, sachant que la sentence ne peut être exécutée. Elle l’est cependant, et par le ciel : la foudre la réduit en cendres sur son trône d’un jour.

Il y a dans ce caractère de Balladyna une étrange puissance, un démonisme dont le personnage de lady Macbeth ne donne qu’une faible idée ; à lady Macbeth il faudrait joindre Gonerille et Régane du Roi Lear pour obtenir cette femme qui est un monstre, et ce monstre qui cependant et malgré tout est une femme, oui, et même mieux que cela, une sorte d’idéal de la femme — j’entends de la femme perverse et passionnée, poussée et entraînée, allant jusqu’au bout ou roulant jusqu’au fond de toute passion et de tout crime.

Mais ce n’est pas là seulement qu’est la beauté de l’œuvre, c’est surtout dans ce sentiment intense, profond de la nature, dans cette puissance magique, dans ce don de vivifier tous les êtres pour ainsi dire noyés dans le grand tout, de faire palpiter l’âme des choses et de donner à tout une voix, une harmonie, un cœur vivant et aimant