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William leva immédiatement les yeux du côté d’Hester, tandis qu’Alice, au contraire, détournait la tête ; mais la jeune fille répondit avec un grand calme :

« Il est allé chez sa tante, à Haytersbank… Je l’ai rencontré, sur la route, avec sa cousine et Molly Corney.

— On le voit fréquemment de ce côté, remarqua William.

— Rien de plus naturel, répondit Hester… Ils sont venus du Cumberland, lui et sa tante. Or, dans un pays étranger, il semble qu’on se tienne de plus près encore.

— Je l’ai aperçu, dit William, à l’enterrement de ce Darley.

— Moi aussi, dit Alice, et je l’ai remarqué avec peine parmi les gens groupés autour du marin qui s’est, dit-on, rendu coupable de tant de meurtres.

— Cela n’est pas prouvé, répondit Hester toujours charitable, et ce Kinraid, d’ailleurs, avait été provoqué, blessé même, et grièvement.

— Serait-il par hasard de Newcastle ? demanda William Coulson avec une avide et soudaine curiosité.

— Je l’ignore, répondit Hester. Betsy Darley ne parle de lui que comme d’un harponneur audacieux entre tous ceux de la côte… Mais il a dû résider à Newcastle, car c’est là, m’a-t-elle dit, que son pauvre frère s’était lié avec lui.

— Et tu le connais ? reprit Alice s’adressant à William.

— Si c’est Charley Kinraid, répliqua-t-il, je ne le connais que trop… Il a fréquenté pendant plus de deux ans ma pauvre défunte sœur, puis il la planta là pour une autre, et son abandon brisa le cœur de la pauvre fille.

— Je ne pense pas, dit Alice, qu’il recommence de longtemps ce jeu-là… Il a reçu du Seigneur un avertisse-