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— La belle question !… Qu’en puis-je savoir ?

— Sa tournure, ses traits, son âge ?… Voyons, ne me faites pas languir !

— Mais je t’ai dit, mon enfant, que c’était à la nuit tombante… Et j’ai tant à faire de mes yeux que je ne lorgne guère le visage de mes pratiques.

— Pour examiner la montre, il vous a fallu de la lumière.

— Peste, quelle subtilité !… J’avais une chandelle que je tenais tout contre mon nez… Je ne l’ai pas levée pour regarder cet homme au visage… C’eût été malhonnête, tu en conviendras. »

Hester n’avait plus rien à dire. Quand il l’eut ainsi réduite au silence, Darley se sentit moins inflexible.

« Après tout, reprit-il, si vous tenez tellement à savoir qui était cet homme, je ne regarde pas comme impossible de vous mettre sur ses traces.

— Et comment ? demanda Hester avec une sorte d’avidité… Je désire en effet le savoir, et j’ai d’excellentes raisons pour cela.

— Soit, alors : je vous dirai tout… C’est un cadet dont le pareil ne se rencontre pas tous les jours… Je suis certain qu’il avait grand besoin de monnaie, et cependant il a tiré de sa poche une bonne demi-couronne enveloppée dans du papier, me priant de la lui trouer. — Prenez garde, lui ai-je dit, quand on gâte ainsi la bonne monnaie du roi, elle cesse pour jamais d’avoir cours, — à quoi il a répondu, marmottant entre ses dents, qu’il n’en fallait pas moins faire la chose… Et il m’a laissé cette demi-couronne, qu’il doit revenir chercher demain vers le soir.

— Oh ! William Darley, dit Hester tendant vers lui ses mains jointes… Sachez qui est cette homme,… sachez où il loge… Sachez tout ce que vous pourrez apprendre de lui… Je vous en serai si reconnaissante ! »