Page:Gaskell - Les Amoureux de Sylvia.djvu/324

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nades rustiques sous le ciel printanier, le long des bois encore sans feuilles et des ruisseaux attiédis.

Un soir du mois de mai, comme elles s’en revenaient toutes trois, Hester se traînait derrière ses deux compagnes d’un pas languissant et sans articuler une parole. Ces symptômes de souffrance n’avaient pas échappé à Sylvia, mais elle n’en fit l’objet d’aucune remarque, pour ne pas contrarier Hester, qui aimait à garder par devers elle tout ce qu’elle ressentait de douloureux. Cependant, cette dernière fut réduite à s’arrêter, épuisée de fatigue et absorbée dans une rêverie singulière.

« Je crains, lui dit Sylvia, que la course n’ait été trop longue. »

Hester, à ces mots, tressaillit presque.

« Non ! répondit-elle ; seulement, ce soir, j’ai la tête plus malade… Elle m’a fait souffrir toute la journée ; mais depuis que nous sommes sorties, il me semble entendre à chaque instant le retentissement d’une canonnade lointaine… Je ne saurais vous dire à quel point ce bruit me fatigue… »

Puis elle se remit à marcher plus rapidement que jamais, ne désirant évidemment ni qu’on s’apitoyât sur elle, ni qu’on fît de ses paroles l’objet d’un commentaire quelconque.

IX

COMMENT ON SE RETROUVE.

En effet, le 7 mai 1799, — mais bien loin de Monkshaven, sur une mer qui reflétait les feux du ciel d’Orient ; — des tonnerres d’artillerie ne cessèrent de retentir.

Au bord de la Méditerranée, le long d’une grève blanche, s’élèvent des deux côtés d’une anse profonde, à