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Hester se consolait avec sa Bible… Elle savait, elle, à qui demander l’oubli de ses peines.

— Je ne refuserais pas de lire, dit Sylvia sur le ton le plus humble… Seulement, il faudrait m’enseigner… Peut-être que cela me ferait du bien… Je suis réellement malheureuse… »

Et, sur l’austère figure d’Alice, ses yeux se levaient remplis de larmes.

Profondément touchée, mais sans en rien laisser voir, celle-ci ne dit rien ce jour-là. Le lendemain, elle appela la jeune femme auprès d’elle et se mit à lui faire épeler, lettre par lettre, le premier chapitre de la Genèse. La docilité, le zèle de la jeune écolière lui eurent bientôt gagné le cœur d’Alice, que la lenteur de ses progrès ne pouvait décourager ; il n’y avait pas là un simple enseignement, mais, à ses yeux, le rachat d’une âme.

Les paroles prononcées au sujet d’Hester étaient pour Sylvia l’objet d’une curiosité, d’un intérêt qui allaient croissant. Prêtant à la jeune Méthodiste les sentiments passionnés qu’elle-même avait eus pour Kinraid, elle s’étonnait de cette douceur, de cette patience inaltérable dont Hester ne s’était jamais départie à son égard, et, — pénétrée du tort qu’elle lui avait fait sans le vouloir, — elle s’efforçait de regagner peu à peu l’affection perdue, de vaincre cette froideur dont elle avait maintenant le secret. Pendant le printemps qui suivit, de fréquentes occasions lui furent offertes de se rendre utile à la jeune Méthodiste, dont la santé s’était altérée et qui, par ordre du médecin, devait chaque jour prendre hors de la ville un exercice salutaire. Sylvia voulut l’accompagner dans ces excursions quotidiennes, la conduire elle-même à ces fermes où il était prescrit à Hester d’aller respirer l’air des étables et boire le lait de vache au sortir de la mamelle. Bella les accompagnait, et c’était une grande joie pour la mère et la fille que ces prome-