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noux de Coulson, afin qu’il cessât de répéter et redire en cent façons les détails d’un récit dont chaque parole la blessait au cœur.

Une des personnes présentes s’avisa de remarquer la coïncidence du retour de Kinraid avec le mystérieux départ de master Hepburn.

« Ainsi va le monde, répondit Coulson volontiers sentencieux… Tel qu’on croyait mort se retrouve bien portant, et quant à Philip, tout vivant qu’il fût, il semblait bon à mettre en terre lorsque je le vis mercredi dernier entrer dans les magasins. »

Pendant tous ces propos, on apprêtait les funérailles de mistress Robson. À la grande surprise d’un chacun, Sylvia, — qui n’était pas sortie de sa chambre depuis la mort de sa mère et qu’on supposait ne rien savoir de ce qui se passait dans la maison, — déclara formellement qu’elle accompagnerait le cortége au cimetière. Personne à cet égard, n’avait d’autre droit que celui des remontrances. Le docteur Morgan espérait d’ailleurs, que dans le cours de cette solennité quelque incident inattendu viendrait déterminer la crise de larmes sur laquelle il comptait pour débarrasser Sylvia de ses intolérables douleurs de tête. Ce fut, en effet, ce qui arriva.

Jusqu’au moment où les assistants se formèrent en rond autour de la fosse, Sylvia était demeurée aussi impassible que jamais. Elle vit alors Kester, dans ses habits du dimanche, un bout de crêpe neuf autour de son chapeau et pleurant, comme si son cœur allait se briser, sur la bière de sa chère maîtresse.

Ces regrets si sincères, ce spectacle imprévu firent enfin couler les larmes de Sylvia, et l’explosion de sa douleur fut si terrible que la bonne Hester, chargée de l’accompagner, craignit qu’elle ne pût assister jusqu’au bout à la triste cérémonie. Sylvia, néanmoins, s’imposa ce pénible effort, et faisant ensuite un détour pour re-