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« Philip s’est plaint de toi, Sylvia !… dit la vieille mère qui ne s’était pas déshabituée de ses anciennes sévérités… Je ne sais plus à propos de quoi, mais il a dit que tu le négligeais sans cesse… Ce n’est pas bien, mon enfant… Une femme doit toujours… mais j’ai la tête bien fatiguée… laisse-moi seulement te dire que ce n’est pas bien.

— Comment, s’écria Sylvia stupéfaite, Philip s’est plaint de moi ?… Il s’est plaint à ma mère ? »

Et l’irritation, autant que le chagrin, semblait sur le point de lui arracher des larmes.

« Non, dit Hester… Ta mère a pris trop à cœur deux ou trois mots prononcés au hasard… Philip aurait tout bonnement voulu que son thé fût prêt à l’heure. »

Sylvia n’ajouta rien, mais ses joues perdirent bientôt leurs vives couleurs, et son front plissé reprit une expression soucieuse. Hester, qui la suivait de l’œil, vit une ou deux larmes tomber sur les vêtements de l’enfant à mesure que sa mère la déshabillait. Elle jugea que le moment était venu de hasarder une entremise conciliatrice et, versant une tasse de thé qu’elle vint présenter à la jeune femme en s’agenouillant auprès d’elle :

« Porte-lui ceci là-bas, murmura-t-elle à son oreille ; il n’en faudra pas davantage pour raccommoder les affaires. »

Sylvia lui répondit sur le même ton, pour ne pas éveiller l’attention de sa mère :

« Une seule chose me touche dans tout ceci… c’est qu’il ait dit du mal de moi devant cette pauvre femme… Je sais quels efforts je fais chaque jour afin de remplir mes devoirs envers lui… Tu n’imagines pas ce qu’ils me coûtent, ma pauvre Hester… Ce soir je serais rentrée à l’heure s’il n’avait fallu nous abriter, ma fille et moi, sous un quartier de rocher, pour éviter les grêlons… Songe ce que c’est, de rentrer ensuite dans cette espèce