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« Où donc est Sylvia ? demanda-t-il.

— Sortie avec l’enfant, répondit la vieille Phœbé, dont le laconisme familier était en ce moment hors de saison.

— Pourquoi ne le fait-elle pas porter par Nancy ?… Je le lui ai pourtant recommandé bien des fois, reprit Philip de plus en plus mécontent.

— Cela ne me regarde pas, c’est à vous de vous faire obéir, répliqua Phœbé, presque aussi blessée qu’il pouvait l’être.

— Je ne prendrai pas mon thé ce soir, dit Philip à Hester quand tout fut prêt… Sylvia n’est pas ici, et rien ne va comme il faut… Je vais continuer l’inventaire… Ne vous pressez pas, Hester, et causez quelques instants avec ma belle-mère.

— Voyons, Philip, lui dit-elle, tu n’en peux littéralement plus… Avale cette tasse de thé… Sylvia serait désolée d’apprendre…

— Sylvia ne s’inquiète guère de moi…, répliqua-t-il en repoussant la tasse avec un geste d’impatience. Sans cela, bien certainement elle serait ici… »

En général, Bell Robson n’écoutait guère ce qui se disait autour d’elle, et l’on s’était insensiblement habitué à ne point la compter parmi les personnes présentes. Le malheur voulut que l’exclamation de Philip eût frappé ses oreilles, suivie comme elle le fut d’un brusque départ.

Cinq minutes après, Sylvia rentrait hors d’haleine, mais toute joyeuse d’avoir soustrait son enfant à la pluie d’orage en l’abritant sous son châle épais. Elle le montrait avec orgueil à Hester qui, de son côté, se confondait en formules d’admiration, pour empêcher Bell de revenir, comme elle la voyait s’y préparer, sur le désagréable incident dont elle avait été témoin. Mais ses précautions furent vaines.