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Vous êtes, je crois, la cousine de Philip Hepburn, et votre famille habite la ferme de Haytersbank ?

— Précisément,… c’est Sylvia Robson, » répondit Molly sans s’apercevoir qu’Hester voulait tout simplement faire diversion et détourner l’attention de Sylvia du sujet qui l’avait si péniblement émue. Puis elle allait commencer, avec les gémissements obligés, le récit de leur excursion à Monkshaven, lorsqu’une porte s’ouvrant derrière elle vint l’arrêter fort à propos. C’était Philip qui, par un geste muet, demandait à Hester s’il lui était permis d’entrer au salon.

Sylvia, détournant son visage du jour qui l’éclairait, se hâta de fermer les yeux. Son fidèle cousin approcha d’elle sur la pointe des pieds, et jeta un regard inquiet sur ceux de ses traits qu’elle n’avait pu lui dérober entièrement ; puis passant la main sur ses cheveux, si légèrement qu’à peine pouvait-il croire les avoir touchés :

« Pauvre petite ! murmurait-il ; combien je regrette qu’elle soit venue aujourd’hui ! Une si longue course, et par cette chaleur ! »

Mais Sylvia, déjà sur son séant, le repoussait presque. Grâce à l’excitation passagère de ses sens, elle venait d’entendre, avant qu’aucun des assistants s’y fût arrêté, le bruit d’un pas qui traversait la cour. Effectivement, au bout d’une minute, une porte vitrée s’ouvrit, et M. Jeremy parut, manifestant quelque surprise à l’aspect du groupe qu’il trouvait réuni dans son salon, ordinairement vide.

Philip se hâta de lui donner les explications nécessaires, et son patron, traversant la pièce sur la pointe du pied, — comme s’il craignait d’être importun, même chez lui, — fit signe au jeune homme de l’accompagner dans le magasin. Déjà au courant du tumulte survenu dans la ville, il venait enjoindre à son principal commis de veiller à ce que les apprentis, rigoureusement retenus