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Et elle ajouta au moment de se mettre en route, se tournant vers Hester :

« Tu es une bonne fille, en somme… Auprès de ma mère tu vaudrais bien mieux que moi… Je ne suis qu’un embarras, une charge, et depuis quelque temps, il semble que je ne puisse servir à rien, ni à personne. »

Ce n’était pas le moment de démontrer à Sylvia qu’elle se trompait. Hester se contenta donc de la suppléer auprès de Bell Robson, à qui elle prodigua tous les soins de la plus tendre fille. Sylvia ne fit que frissonner et pleurer tout le temps de la route. Elle ne parlait, elle ne s’inquiétait que de son père. Quand elles arrivèrent à la porte de Philip, cette porte s’ouvrit d’elle-même avant qu’elles ne fussent descendues. Quelqu’un, bien évidemment, les guettait de loin. Phœbé, l’ancienne domestique, une des dépendances de la maison où elle servait depuis plus de vingt ans, sortit dans la rue, tenant à la main un flambeau qu’elle protégeait de son mieux contre le vent, tandis que Philip aidait mistress Robson à descendre par le fond de la voiture. Hester, sur le devant, montée la dernière, devait être la première à sortir. Au moment où elle se levait, elle sentit sur son bras se poser la petite main de Sylvia.

« Croyez bien, lui disait celle-ci, que je vous suis reconnaissante… Je vous prie de me pardonner la dureté de mon langage… Mais, voyez-vous, ces craintes au sujet de mon père m’ont vraiment brisé le cœur. »

Ces mots furent prononcés avec un accent si plaintif, si imprégné de larmes, qu’Hester ne put s’empêcher d’être émue. Elle se pencha vers Sylvia, lui baisa la joue, et descendit ensuite, sans trouver aucune assistance, du côté que personne ne songeait à éclairer. Philip, pour qui elle venait d’accomplir cette rude mission, pensait à toute autre chose qu’à l’en remercier. En regardant derrière elle, au moment de tourner le coin de la