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une espèce d’arme. Ce n’était, après tout, que sa fourche d’écurie.

« Maintenant que le maître est au lit, lui dit-il tout bas, je vous serais bien obligé de me laisser coucher dans la maison… Soyez absolument certaine que pas un constable de Monkshaven n’y pénétrera tant que je monterai la garde. »

À ces mots, Bell se sentit prise d’un léger frisson.

« Non, Kester, lui dit-elle en lui posant légèrement la main sur l’épaule… Il ne faut pas prendre peur comme cela… Notre homme n’a rien fait de mal, et on ne saurait lui chercher chicane. »

Kester, toujours immobile, secouait la tête :

« Il ne faut pas trop s’y fier, reprit-il ; ces feux de joie offusquent beaucoup de monde… Laissez-moi, maîtresse, laissez-moi dormir au coin de la cheminée !…

— Non, Kester… commençait-elle, mais, changeant tout à coup d’avis : Dieu te bénisse, mon brave homme ! lui dit-elle… Viens t’étendre sur le banc !… tu auras mon manteau pour te préserver du froid ;… notre Daniel n’a déjà pas tant d’amis en ce monde, et il vaut mieux nous trouver ainsi réunis sous le même toit, sans murs ni verrous qui nous séparent. »

Kester coucha donc cette nuit dans la maison ; et personne ne s’en doutait, — à l’exception de Bell.

XI

LES MAUVAIS JOURS.

Le lendemain, par une sorte d’accord tacite, il ne fut fait aucune allusion aux incidents que nous avons racontés. Chacun, au fond, aurait désiré un supplément