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On leur répondait (car il y a réponse à tout, dans le domaine des suppositions) que les vieux gentlemen roulaient probablement quelque dessein profond dans leurs têtes prévoyantes, le jour où ils avaient permis à leur cousine de prendre chez elle Coulson et Hepburn, — l’un qui pouvait passer pour leur neveu, — l’autre qui, tout jeune encore, était évidemment à la tête de leur commerce. Que l’un ou l’autre vînt à s’amouracher d’Hester, et la combinaison secrètement rêvée par les deux quakers se réaliserait conformément à leurs vues.

Pendant que nous entrons dans tous ces indispensables détails, Hester attend patiemment le bon plaisir de Sylvia, qui reste là plantée devant elle, un peu intimidée, un peu étourdie par la vue de tant de belles choses.

Hester était une grande jeune femme sans aucun embonpoint, mais taillée dans d’assez amples proportions, et que la gravité de son aspect semblait vieillir quelque peu. Ses épais cheveux bruns, divisés en bandeaux sur son large front, étaient retenus en bon ordre par son bonnet de mousseline ; le galbe de son visage était légèrement anguleux et son teint manquait de fraîcheur, mais sa peau était d’une finesse remarquable. L’honnête et affectueuse expression de ses yeux gris les rendait charmants ; et quand ses lèvres, d’ordinaire un peu serrées, comme celles des gens qui ne disent pas toujours ce qu’ils pensent, — venaient à dessiner quelque rare sourire, lorsqu’on entrevoyait derrière elles deux rangées de dents éblouissantes et parfaitement égales, lorsque ses yeux si doux se levaient en même temps sur celui à qui elle parlait, sa physionomie devenait tout à coup très-engageante. La couleur sobre et la coupe modeste de ses vêtements n’avaient rien qui ne fût d’accord avec les idées religieuses des Foster ; mais Hester elle-même n’appartenait pas à la secte des Amis.