Page:Gaskell - Les Amoureux de Sylvia.djvu/154

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pas le premier mot… Ce n’est pas à moi, d’ailleurs, qu’il faut venir faire ces histoires… Allez les lui répéter en face, vous verrez ce qu’il vous dira !

— Sylvia ! Sylvia ! » s’écria le pauvre Philip au moment où sa cousine passait devant lui, d’un pas hâté par la colère, pour se réfugier dans sa petite chambre dont il l’entendit pousser les verrous de bois… Puis il demeura immobile de désespoir, la tête enfouie dans ses mains. Le crépuscule s’éteignit, la nuit vint, les tisons se consumèrent sans qu’il eût bougé. Dolly Reid, son ouvrage fini, était retournée chez elle. Philip et Sylvia se trouvaient seuls dans la maison. N’importe ; malgré tout ce qu’il avait à faire encore avant son départ, il ne pouvait prendre sur lui de se lever. À la fin, cependant, il dressa son corps roidi sur ses jambes chancelantes. Pour la première fois de sa vie, il gravit le petit escalier de bois, jusqu’à l’étroit palier qu’obstruait le coffre aux gâteaux d’avoine. Après une minute de pénible hésitation, il heurta légèrement la porte de la chambre où la jeune fille s’était retirée.

« Je m’en vais, Sylvia… Un adieu, de grâce ! » — Pas de réponse. Aucun bruit. « Sylvia !… Sylvia !… Je serai longtemps absent. Qui sait si je reviendrai jamais… » — Ici s’offrit à lui l’amère pensée que sa mort ne causerait aucun chagrin. — « Vous pouvez bien me dire adieu… » — Pas de réponse. Il attendait patiemment ; peut-être, accablée de fatigue, s’était-elle endormie. Et pourtant, une fois encore : « Adieu, répéta-t-il, adieu, Sylvia, et que la bénédiction de Dieu soit sur vous !… Je suis fâché de vous avoir fait de la peine. »

Pas plus de réponse que par le passé.

Le cœur gros, le gosier serré, il descendit pesamment l’escalier, chercha son bonnet dans l’obscurité, puis sortit de la maison…

« Au moins est-elle avertie, » pensait-il. Juste en ce